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La rue du Rocher (1734-1816)

Quartier de l’Europe

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Vue du dôme de l’église Saint-Augustin, prise du pont de la rue du Rocher

La rue du Rocher, créée en 1734 sur une vieille voie romaine, ne reliait que la rue de la Bienfaisance, avant d’absorber, en 1816, la rue des Errancis, située exactement dans son alignement. Elle débute aujourd’hui à l’intersection de la rue Pasquier, traverse ce qui était, au XVIIIe siècle, le quartier maraîcher de la Petite-Pologne, enjambe la rue de Madrid, située en contrebas, et se poursuit jusqu’à la place Prosper-Goubaux et le boulevard de Courcelles. 

Lors du percement de la rue du Rocher, le quartier était peu construit et surtout connu pour ses moulins : le moulin de la Marmite, à l’angle de la rue de Madrid ; le moulin des Prunes et le Boute-à-Feu, un peu plus loin ; le moulin des Prés, à l’emplacement du chevet de l’église Saint-Augustin.

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Paris en train : Percée de la rue de Madrid sous la rue du Rocher (avril 1868), in : L’Illustration Nouvelle, Paris, A. Cadart et Luce, 1868.

En 1868, la vie quotidienne des habitants de la rue du Rocher fut quelque peu bousculée par la prolongation de la rue de Madrid, qui se terminait en cul-de-sac. Pour cela, on creusa sous la rue du Rocher et on érigea, pendant le chantier un pont de fortune, afin de relier les deux parties séparées. Cet ouvrage provisoire fut, à l’issue des travaux, remplacé par un pont métallique construit en treillis par Ernest Goüin.

 

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PARIS – La Rue du Rocher et la Rue de Rome, vers 1900, carte postale, collection particulière

Du côté de la rue Pasquier, l’embouchure de la rue du Rocher est encadrée par deux immeubles en pierre de taille. L’immeuble le plus soigné, bâti en 1868, borde également la rue de la Pépinière. La façade principale, située au 2, rue de la Pépinière, est ornée de mascarons à têtes de faune et de bacchante, de médaillons à profil féminin, de mufles de lions et de guirlandes frappées de la lettre « H », rappelant plus ou moins les façades du Louvre de Napoléon III.

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L’Hôtel Aubry – 8, rue du Rocher

Le premier édifice remarquable de la rue du Rocher est l’hôtel particulier de Madame Aubry, née Vittet. C’est un édifice « brique et pierre », dont la façade repose sur un haut soubassement décoré de refends, ouvert par deux portes latérales et éclairé par d’étroites fenêtres. L’Hôtel Aubry s’élève sur deux niveaux mêlant la brique rouge à la pierre crême, auxquels s’ajoute un rang de lucarnes sous combles. Les fenêtres à meneaux de l’étage noble sont coiffées d’un fronton arrondi, entrecoupé de rinceaux sculptés débordants.

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Lycée Racine – Rue du Rocher, vers 1900, carte postale, collection particulière

Les façades du lycée Racine se dressent au-delà du carrefour formé par les rues Laborde et Joseph-Sansboeuf. L’établissement scolaire, bâti en 1886 par Paul Gout (1852-1923), un élève d’Eugène Viollet-Le Duc, s’organise autour de deux cours intérieures, qui s’étendent entre les rues de Rome et du Rocher. Les bâtiments du lycée Racine mêlent les éléments médiévaux et renaissants.

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Le bâtiment principal

Les deux bâtiments de la rue du Rocher s’appuient sur un soubassement percé de soupiraux, qui rachète la pente du terrain. Le bâtiment principal, plus élevé, comprend trois niveaux, couronnés d’une corniche de pierre, et d’un rang de lucarnes sous combles. Sa porte est encadrée par deux colonnes à chapiteau ogival, qui soutiennent un entablement. Les fenêtres de l’étage médian des deux bâtiments sont divisées par des meneaux verticaux en forme de colonnes à chapiteau ionique et corinthien.

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L’immeuble situé au n° 26, rue du Rocher

L’immeuble signé et daté « E Le Chevallier 1891 » s’inscrit dans le sillage des constructions haussmanniennes. Il est entièrement construit en pierre de taille et repose sur un rez-de-chaussée et un entresol décorés de refends. Les balcons et les garde-corps des premiers étages sont à balustres en pierre, contrairement au grand balcon du quatrième étage. Le dernier étage est, quant à lui, précédé d’un balcon filant. Les consoles sont assez massives et soigneusement décorées de feuilles d’acanthe.

Des mascarons à têtes de faune barbu et cornu ou de jeune bacchante servent d’appui aux consoles. Aux extrémités du balcon à garde-corps en ferronnerie, les têtes de bacchante retiennent, par un ruban, de petits cartels posés sur un cartouche et un mufle de lion. Des guirlandes de fruits sont sculptées sous les appuis des fenêtres du troisième étage.

Les larges trumeaux paraissent toutefois dépouillés, comme si la décoration prévue n’avait pas été complètement réalisée, et les fenêtres sont dépourvues d’encadrements et de frontons.    

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L’immeuble aux tiges grimpantes – 50, rue du Rocher

L’immeuble aux tiges grimpantes s’élève à quelques mètres du pont métallique. Bâti en 1904 par Lucien Roy (1850-1941) dans un style « Art Nouveau », cet immeuble repose sur un haut soubassement en larges pierres de taille, qui englobe le rez-de-chaussée et le premier étage. 

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L’immeuble aux tiges grimpantes

La porte à vantaux en verre et ferronnerie s’insère dans une arcade formant un glacis, dont l’arête est décorée de petites feuilles. Les parements de brique beige et les encadrements de pierre caractérisent les niveaux supérieurs. Des oriels terminés en terrasse à balustrade et de longs balcons centraux animent la façade de l’immeuble. Ces éléments en saillie prennent appui sur les linteaux des fenêtres, qui servent de soubassements et concentrent les reliefs de tiges grimpantes, sculptés par Camille Lefèvre (1853-1933). 

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L’escalier reliant la rue du Rocher à la rue Portalis

Du côté des numéros pairs, un étroit escalier accolé aux immeubles relie la rue du Rocher à la rue Portalis, située en contrebas. Cette rue, créée en 1859, se jette dans la rue de Madrid.

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L’immeuble aux génies

Le petit immeuble du n° 56, bâti en 1875, passerait inaperçu sans l’entablement à reliefs surmontant sa porte d’entrée.

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Le génie de la Peinture

Cet entablement comprend deux petites tables sculptées représentant les génies de la Peinture, l’un prenant les proportions d’un modèle et l’autre, palette et pinceau en mains, assis devant son chevalet, travaillant d’après nature sous l’œil attentif d’un élève.

Ces saynètes sont couronnées d’un fronton arrondi, interrompu par une fenêtre, qui renferme une palette et une branche d’olivier nouées d’un ruban. Ce décor rappelle le séjour du peintre Jules-Emile Saintin (1829-1894), qui vécut à Paris, d’abord rue Washington puis, vers 1877, rue du Rocher, après avoir longtemps travaillé aux Etats-Unis.

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L’hôtel particulier aux bossages – 58, rue du Rocher

L’hôtel particulier de la parcelle voisine contraste nettement avec la simplicité de l’immeuble aux génies. Construit en « brique et pierre » et caractérisé par de très forts bossages géométriques, sa façade polychrome est saisissante. Elle s’appuie sur un haut soubassement qui contient la porte d’entrée et s’élève sur quatre niveaux, auxquels s’ajoute un rang de lucarnes. La corniche à modillons intermédiaire et la coloration différente de la brique laissent toutefois supposer que l’édifice, probablement construit vers 1880, fut tardivement surélevé. 

Les principaux étages possèdent de grandes fenêtres à croisée, bordées de garde-corps à balustres de pierre au premier étage. Le chaînage des baies est surchargé à l’étage noble, puis s’estompe en volume. Les trumeaux de brique rouge portent des tables de pierre, plus larges sur les travées de droite, qui dynamisent la composition générale de la façade.   

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L’Hôtel Hochon

Un imposant hôtel particulier, bâti en 1877, se dresse quelques mètres plus loin, du côté des numéros impairs. Dans ses Promenades dans toutes les rues de Paris par arrondissements, Félix de Rochegude attribue la paternité de cet hôtel particulier à  Hector Lefuel, successeur de Visconti sur le chantier du Louvre (Paris, Hachette, 1910, p. 48).

Madame Hochon

Ernest Hébert (1817-1908)

Portrait de Louise Hochon, née Lefuel, vers 1882, huile sur bois, 24 x 19 cm, Paris, musée d’Orsay

L’historicisme de l’Hôtel Hochon laissa pour le moins perplexe : «  C’est une bien curieuse construction, aujourd’hui noirâtre, une bizarre architecture, avec une manière de golfe étroit, une courette ouverte sur la rue derrière une grille. (Cela conviendrait assez bien à une fauverie !) Le bâtisseur de cette étrange demeure, aux fenêtres d’un style indéterminé, prétendit-il faire table rase du passé, ou bien puisa-t-il son inspiration en diverses époques ? L’une ou l’autre de ces suppositions paraît également absurde. C’est pourtant la fille d’un architecte qui vint habiter ici. La fille de Lefuel, qui réalisa les guichets du Louvre du côté de la Seine, et construisit l’hôtel Fould rue du Faubourg-Saint-Honoré. Je veux croire qu’il n’est pour rien dans l’édification de l’hôtel de sa fille… » (André de Fouquières, Mon Paris et ses Parisiens, Paris, 1954, vol. 2 : Le quartier Monceau).

Le salon littéraire et artistique de Madame Hochon, qui se tenait tous les mardis, était notamment fréquenté par Alexandre Falguière, Jean-Léon Gérôme, Guy de Maupassant et Charles Gounod.

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La loggia métallique

L’Hôtel Hochon fut remanié en 1903 par Lucien Magne (1849-1916), connu pour avoir été l’un des derniers architectes du Sacré-Cœur. Il comprend un corps de logis central, coiffé d’un dôme et relié en pans coupés à deux ailes, dont les petits côtés donnent sur la rue. 

Le petit étage des bâtiments forme, face à la rue et à gauche de la cour, une arcature de colonnes à chapiteau dorique. Des fenêtres jumelées, voûtées en plein cintre, et des balcons à balustres de pierre animent les façades. Une loggia métallique fait saillie sur les niveaux supérieurs du corps de logis et des premières travées des ailes.

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Le théâtre Tristan-Bernard

L’immeuble du théâtre Tristan-Bernard se dresse quasiment sur le trottoir opposé. Bâti entre 1912 et 1914 par l’architecte Théo Petit (1865-1930), afin d’abriter l’établissement d’enseignement privé pour jeunes filles de la Fondation Léopold-Bellan, il renfermait initialement des ateliers de commerce et des bureaux de dessin, ainsi que deux salles de spectacle.

L’établissement accueillit, dès 1919, le public dans ses salles de spectacle, qui devint le théâtre Albert-Ier, en l’honneur du roi des Belges ; puis porta le nom de Tristan Bernard (1866-1947), qui prit sa direction en 1930. Le style néo-Louis-XVI de la grande salle du théâtre Tristan-Bernard, que l’on classa au titre des Monuments Historiques en 1991, est inspiré du décor de la salle Gaveau. Une marquise en fer et en verre, surmontée d’un écusson au chiffre, protège la porte d’entrée : elle s’appuie sur des consoles à enroulements de rinceaux, qui retiennent deux lanternes. 

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L’immeuble aux balcons en forme de « baignoire » – 65, rue du Rocher

L’hôtel particulier daté et signé « TRONQUOIS / ARCHITECTE / 1881 » se détache des constructions voisines par ses bossages et son décor sculpté. Il est l’œuvre d’Auguste Tronquois (1829-1884), dont le nom est associé aux façades de plusieurs hôtels particuliers du quartier Monceau.

L’hôtel particulier de la rue du Rocher repose sur un soubassement et un rez-de-chaussée qui se développent de part et d’autre d’une porte sévèrement encadrée de pilastres doriques. Cette porte est couronnée d’un entablement à corniche orné d’un médaillon au chiffre. Les travées centrales de la façade sont décorées de refends et de balcons en forme de « baignoire » à garde-corps en ferronnerie. Les derniers étages sont soulignés par des balcons filants qui réunissent toutes les travées. 

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L’immeuble aux garde-corps à motif de carquois

L’immeuble « Art Déco », situé à l’angle de la rue de Naples, est caractéristique des réalisations de Jean Boucher, qui contribua à l’ensemble immobilier de la rue du Mont-Cenis, dans le XVIIIe arrondissement. L’immeuble de la rue du rocher comprend deux ailes en équerre, réunies par une tour d’angle en encorbellement et coiffée d’un dôme. Les murs des niveaux supérieurs sont recouverts de brique beige, à l’exception des murs de la tour d’angle, entièrement construits en pierre apparente.

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Le motif de carquois et ses flèches des garde-corps des fenêtres

Daté de 1926, il se distingue essentiellement par ses garde-corps en ferronnerie ornés d’un médaillon ceint d’une branche d’olivier et garni d’un carquois et de ses flèches. 

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L’immeuble situé au n° 73

Sur le trottoir opposé, l’architecte Adolphe Viel, actif à la fin du XIXe siècle, construisit, en 1880, trois immeubles formant une séquence harmonieuse. Les façades ont des élévations et des ordonnances similaires, mais des décors sensiblement différents. Les immeubles latéraux possèdent deux portes identiques, flanquées de pilastres cannelés et bagués, avec un entablement à guirlandes. L’alternance des motifs ornementaux (faisceaux végétaux, draperies, couronnes de laurier, branches d’olivier) évite toutefois l’écueil d’une répétition monotone.

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L’immeuble situé au n° 91, rue du Rocher

L’immeuble situé à l’angle de la rue de Monceau occupe l’emplacement du cimetière des Errancis, que la Ville de Paris avait décidé d’ouvrir sur un terrain vague, le 25 mars 1794, après la fermeture du cimetière de la Madeleine. Son périmètre était bordé, au nord, par le mur des Fermiers-Généraux (matérialisé par le boulevard de Courcelles), à l’ouest, par l’actuelle rue de Miromesnil et au sud, par la rue du Valois-du-Roule, désormais rue de Monceau.

  Le cimetière des Errancis reçut les corps mutilés d’un millier de personnes après leur exécution par décapitation sur la place de la Révolution, aujourd’hui place de la Concorde. Plusieurs figures de la Révolution y furent sommairement inhumées : Danton, Camille Desmoulins, Lavoisier, Robespierre, Saint-Just. Elisabeth de France, sœur de Louis XVI, y fut également inhumée le 10 mai 1794. Un panneau, fixé à l’entrée du cimetière, indiquait « Dormir, enfin ».

Le cimetière des Errancis continua de fonctionner pour la population de plusieurs arrondissements de la rive droite jusqu’au 23 avril 1797. Après sa fermeture, le terrain fut divisé et vendu en parcelles pour être loti. Les ossements découverts au fur et à mesure furent transportés dans les Catacombes de Paris. Une plaque commémorative est appliquée sur l’entrée de l’immeuble à l’angle des rues du Rocher et de Monceau : « Emplacement de l’ancien cimetière des Errancis où furent inhumées du 24 mars 1794 au mois de mai 1795 les corps de 1119 personnes guillotinées place de la Révolution ».  

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L’immeuble situé au n° 93

La rue du Rocher rejoint la rue de Constantinople et débouche sur la place Prosper-Goubaux et le boulevard de Courcelles. Du côté impair, le passant attentif ne manquera pas la façade rouge-brun de l’immeuble « brique et pierre », probablement édifié vers 1900, et sa coloration particulière au soleil couchant. 

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